Des horaires plus souples, du temps économisé et moins de fatigue dans les transports, un meilleur équilibre entre vie privée et vie professionnelle, le télétravail présente de nombreux avantages. En France, 17 % des salariés seraient concernés. Que dit la loi?
Publié le 1 août 2017
La loi Warsmann II, relative à la simplification du droit et à l’allègement des démarches administratives, a été adoptée le 22 mars 2012. En matière de droit du travail, elle apporte notamment des précisions sur le régime du télétravail, dans son article 46 qui ajoute au Code du Travail les articles L. 1222-9 à L. 1222-11. La loi fournit tout d’abord une définition du télétravail qui « désigne toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon régulière et volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication (TIC) dans le cadre d’un contrat de travail ou d’un avenant à celui-ci. ».
Le salarié doit être volontaire, avoir un métier qui ne nécessite pas une présence physique et l’accord écrit de sa direction. Néanmoins, comme le télétravail n’est pas reconnu par la loi comme un « droit », mais comme une « forme d’organisation », l’employeur peut le refuser sans avoir à se justifier. A contrario, il ne peut pas l’imposer à un salarié. Le refus d’accepter un poste de télétravailleur n’est pas un motif de rupture du contrat de travail.
Le contrat de travail ou son avenant précise les conditions de passage en télétravail et les conditions de retour à une exécution du contrat de travail sans télétravail. A défaut d’accord collectif applicable, le contrat de travail ou son avenant précise les modalités de contrôle du temps de travail.
Outre ses obligations de droit commun vis-à-vis de ses salariés, l’employeur est tenu à l’égard du salarié en télétravail (Art. L. 1222-10) :
de prendre en charge tous les coûts découlant directement de l’exercice du télétravail, notamment le coût des matériels, logiciels, abonnements, communications et outils ainsi que de la maintenance de ceux-ci ;
d’informer le salarié de toute restriction à l’usage d’équipements ou outils informatiques ou de services de communication électronique et des sanctions en cas de non-respect de telles restrictions ;
de lui donner priorité pour occuper ou reprendre un poste sans télétravail qui correspond à ses qualifications et compétences professionnelles et de porter à sa connaissance la disponibilité de tout poste de cette nature ;
d’organiser chaque année un entretien qui porte notamment sur les conditions d’activité du salarié et sa charge de travail ;
de fixer, en concertation avec lui, les plages horaires durant lesquelles il peut habituellement le contacter.
En cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d’épidémie, ou en cas de force majeure, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés. Les conditions et les modalités d’application du présent article sont définies par décret en Conseil d’Etat.
Travailler chez soi peut être bénéfique aussi bien pour les salariés que pour les entreprises
Psychologue spécialisée en psychologie clinique et psychopathologie, Victoria Tchakmazian travaille au sein du cabinet Psya depuis six ans, comme directrice de l’accompagnement psychologique, social et d’aide à distance. Elle revient sur les effets du télétravail.
Publié le 21 avril 2020
Les Français découvrent en masse le télétravail. Quel peut être son impact sur leurs méthodes de travail ?
Ces dernières années, de plus en plus d’entreprises ont adopté le télétravail. Toutefois, ce mode de travail n’est pas encore totalement accepté par tous les dirigeants. La crainte de moindre productivité des salariés persiste, alors que de nombreuses études ont démontré le contraire : les collaborateurs sont plus productifs et efficaces en télétravail.
Le confinement amène beaucoup d’entreprises et de salariés à réajuster leurs façons de travailler en s’adaptant aux impératifs de la crise sanitaire. Cela pourrait avoir un impact sur les méthodes de travail à plus long terme.
Les collaborateurs découvrent et apprivoisent les outils informatiques permettant de travailler à distance, pour certains cela demande de déployer des efforts considérables d’adaptation. L’éloignement physique des collègues et du management peut également avoir :
des conséquences positives
- moins de stress,
- meilleure concentration
mais aussi des inconvénients
- réduction des contacts sociaux,
- voire isolement à plus long terme.
Le télétravail doit s’organiser et être pensé en amont. Or, la situation actuelle a imposé aux collaborateurs et aux entreprises de mettre en place ce mode de travail sans avoir de temps de préparation. Certains Français le découvrent, d’autres l’élargissent. Dans les deux cas, nous pouvons nous attendre à observer des impacts sur les collaborateurs, mais aussi sur les organisations elles-mêmes.
Cela peut-il être bénéfique pour les salariés et pour les entreprises ?
Travailler chez soi peut effectivement être bénéfique, aussi bien pour les salariés que pour les entreprises. Les télétravailleurs peuvent constater des améliorations de leur qualité de vie au travail : moins de stress, un gain de temps de trajet, une meilleure concentration, une autonomie plus large dans la gestion de leurs tâches et de leur temps de travail.
Pour les entreprises, ce mode de travail peut également représenter des avantages : responsabilisation et autonomie des collaborateurs, amélioration de leur qualité de vie et leur productivité, réduction de frais de structure (locaux et autres frais annexes).
Cette pratique nouvelle de télétravail peut-elle durer dans le temps ?
Le télétravail présente de nombreux avantages pour les collaborateurs et pour les organisations. En revanche, sa pérennisation peut avoir des impacts négatifs sur la santé mentale des salariés : surcharge de travail, augmentation de la durée des journées de travail, isolement social, désengagement, etc. Il peut également renforcer des inégalités professionnelles entre les métiers qui peuvent facilement être exercés en télétravail et d’autres, qui nécessitent une présence de salariés sur site.
Si le télétravail doit durer dans le temps, l’employeur est tenu de prendre les mesures nécessaires pour protéger les données utilisées par le télétravailleur à titre professionnel (mails, documents partagés, etc.) Il doit également définir clairement les horaires afin d’équilibrer la charge de travail. Les méthodes de travail, l’organisation et les temps de réunions doivent aussi être réadaptées à cette situation d’éloignement : temps informels de regroupement, outils de partage, réunions plus fréquentes afin de rester en contact avec les équipes. Il est également essentiel, pour les managers, d’être capables d’accorder leur confiance à leurs collaborateurs et de leur permettre d’être autonomes.
Les études ont démontré qu’il n’est pas favorable de déployer ce mode de travail à temps plein. La meilleure solution est de le proposer à temps partiel. Par ailleurs, la mise en place d’un tel dispositif doit rester un choix et non une obligation.